dimanche 11 octobre 2015

Attente

11 octobre 2015


J'ai encore dormi toute la journée, de minuit à 17H00. Il est 21H00 à présent, je suis dehors depuis près de deux heures, mais pas réveillé pour autant. Je suis toujours dans ma même pensée, comme bloqué face à elle, ce qui ne me dérange absolument pas. Je pense sans réellement y penser, sans réfléchir dessus, à ma maladie, attendant patiemment mon dernier jour. Tout à l'heure, une amie de ma mère me demandait si je voulais vivre ou mourir. Clairement, de suite je lui répondis que j'avais hâte de mourir. Je vis que ma réponse la surprenait, mais c'est ainsi que je l'éprouve.

Sinon Paris me fatigue vraiment, ne me donne qu'une envie ; fuir cette ville où le silence n'existe pas. Cependant cela ne m'empêche pas de focaliser sur mon cerveau, mes tumeurs, la peur qui se dissipe chaque jour un peu plus face à mort prochaine. Je contemple tout cela comme d'autres regardent une série. Je ne pense à rien, ne fait que regarder, et quoi que je regarde, tout me semble futile parce qu'éphémère. Du coup je m'attarde sur rien, personne, et même sur ma maladie ne m'intéresse plus, son fonctionnement, sa prise en main par la médecine, tant je pense que le  tour est joué en ce qui me concerne. Ainsi, la seule chose qui me surprend encore, c'est d'être toujours là, vivant aujourd'hui, et ce simple constat suffit à me faire passer une bonne journée. Il ne peut y avoir de meilleure nouvelle pour moi et même si dans cette journée je connais des désagréments, ils font « pschitt », s'évapore presque aussi vite qu'ils sont apparus et, vite, je les oubli.

Enfin de compte, la seule gêne que j'éprouve avec ce cancer, bien plus que mes handicaps intellectuels ou moteur, c'est mon essoufflement quasi permanent. Dés que je prononce un phrase, dès que j'ouvre la bouche, d'entrée de jeu je suis dans l’essoufflement. C'est la même chose dès que je bouge, quoi que je fasse, que je me lève, que je  m'habille, que je marche ou que je porte quoi que ce soit. Enfin, bizarrement, dès que je me concentre pendant un moment, je sens littéralement mon esprit essoufflé,  au même titre que mes poumons, et je dois interrompre ce que je fais. Je regarde alors le ciel, récupère. C'est comme si  la concentration bouffait tout l'oxygène qui circule dans mon cerveau et, à moment donné, arrivant près de la rupture de stock, je n'ai d'autre choix que de le reconstituer. Pour se faire, il me faut facilement entre quinze et trente minutes.

Sinon, je pense chaque jour à Cynthia à qui je n'ai plus rien à dire, comme envers Tony. Autant j'apprécie de sentir leur présence physique, autant, paradoxalement, leur absence ne me manque pas. Me dire à moi-même, vouloir me faire croire à moi-même le contraire, serait me mentir et vous mentir. Oui, je ne peux plus me leurrer, et en cela c'est un changement radical de ma personne, l'absence des êtres qui m'étaient chers n'est plus un manque, ma fille incluse. Je ne tire pas de conclusions de tout cela, je constate et ne vois plus l'intérêt de me demander pourquoi j'évolue ainsi.

5 commentaires:

  1. Quand voyez vous le médecin? Je crois que la vie à Paris vous épuise, surtout après un déménagement.
    Je pense fort à vous. Quand vous irez mieux, nous reparlerons de déterminisme et de liberté. En attendant consacrez votre énergie à vous soigner
    Je vous embrasse très fort
    Mamy

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  2. Bonsoir Mamy,
    normalement l'hôpital devrait me contacter cette semaine. Je suis donc dans l'attente et, au plus tard, je les appellerai vendredi si je n'ai pas de nouvelles. Quoi qu'il en soit, je pensais qu'à Paris les choses iraient plus vite, mais ce n'est pas cas.

    Sinon, quand vous le déciderez, je suis près à converser du déterminisme, de la liberté et même de l'égalité, l'une des valeurs fondamentales de notre pays, mais qui, dans les faits, n'a jamais existé dans ma conception des choses, et pas seulement dans les tribunaux.

    Cependant je ne sais pas comment, vous, vous allez. Avez-vous toujours votre beau-fils et votre petit enfant auprès de vous?

    Je vous embrasse également très fort, vous dit à très bientôt et, surtout, vous souhaite la meilleure santé possible.

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    1. Je ne serai pas là la semaine prochaine; nous retrouverons Zazou, ses filles et ses beaux parents au Mont Saint Michel. Et je ne prends jamais mon ordinateur; je penserai très fort à vous néanmoins
      Pour ma santé c'est cahin-caha, je fais avec
      Je vous embrasse très fort et bon courage pour les divers examens
      Mamy

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  3. Tout plein de bonnes et belles choses pour toi hicham, courage.. ta fille te rejoint bientôt et vous retrouver va vous faire du bien.. je pense bien à toi.. à plus tard, prends soin de toi, amicalement, virginie

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  4. Bonjour Hicham, bientôt les vacances avec ta fille, moi je pars demain à Tlemcen.
    Je pense fort à toi, courage.

    Lila

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